Changements choisis, changements subis: et si le mot changement était inutile ?
Et si nous utilisions d’autres mots que “changement” dans notre vocabulaire et nos objectifs de vie ? Aucun autre mot n’est plus trompeur, insuffisant, ramasse-tout et peut-être inutile, nous explique le psychiatre et écrivain Christophe André.
L’être humain, selon les études de psychologie scientifique, éprouve à la fois une profonde aversion à l’incertitude (et au changement) et un vorace appétit pour la nouveauté. D’où cette tension, permanente, que nous ressentons tous entre le désir et la crainte, l’envie et la peur du changement.
“On ne change pas de coiffure comme on change de vie, de conjoint, de métier. Il y a tant de changements possibles !,” écrit Christophe André. Il y a des changements choisis, et des changements subis. Toutefois, comme le souligne le psychiatre, “de tout changement, même choisi, nous aurons à subir les imprévus, petits ou grands (mais chacun sait que de petits changements peuvent parfois conduire à de grands bouleversements), heureux ou douloureux” (mais en définitif comment savoir si ce qui nous afflige aujourd’hui ne se révélera pas une chance demain ?)
Et si nous préférerions au mot “changement” de synonymes plus nuancés (et plus justes): comme “modifier, ajuster, évoluer, se renouveler, chambouler, révolutionner” ?
Au fond, tout changement n’est-il qu’une illusion ? questionne Christophe André avant de rajouter: “Une de mes patientes, déprimée chronique, me racontait ainsi: “tous mes proches me disent de changer des choses dans ma vie: mon logement, mon travail, s’occuper de moi, partir en vacances, etc. Ils ne se rendent pas compte que je peux déprimer partout.”
D’où cette légitime interrogation: la finalité de tout changement de vie extérieure n’est-elle pas d’aller vers un mieux intérieur, d’être plus épanoui, moins stressé ? Dès lors, “n’y aurait-il de vrai changement que psychologique ?”
Et à Christophe de répondre: “Bien sûr que non, les liens sont simplement à double sens: le changement environnemental facilite le changement mental, mais ne le garantit pas ; et le changement psychique a besoin, pour s’accomplir, de s’appuyer sur des changements physiques ou symboliques.”
Source: Christophe André, Le 1, n°214, « Et si vous changiez de vie? », 29 août 2018