Votre vie est-elle écrite d’avance ? Plongée dans le scénario de vie selon l’Analyse Transactionnelle
Bis repetita. Et si, sans le savoir, nous rejouions encore et encore un film dont le scénario a été écrit bien avant l’âge adulte ? En effet, chacun de nous cheminons dans l’existence avec un script intérieur, forgé dès l’enfance. Ce scénario de vie, composé par les messages reçus, les émotions vécues et notre besoin de sécurité et d’appartenance, façonne nos croyances, nos comportements, nos relations, nos aspirations et parfois même nos échecs répétés. Enfant, dans un monde souvent flou, instable, voire menaçant, ce scénario a été une véritable aide et un repère précieux. Il nous a structurés, rassurés et permis d’avancer. Toutefois, avec le temps, ce qui était un soutien peut se transformer en cadre trop rigide, une mécanique inconsciente qui nous enferme dans des schémas qui ne nous ressemblent plus. Le scénario de vie, ce concept central de l’Analyse Transactionnelle n’est toutefois pas une fatalité. Il peut être mis en lumière, compris, intégré et actualisé.
Qu’est-ce qu’un scénario de vie, en Analyse Transactionnelle ? Une histoire d’adaptation
Quand l’enfant que vous étiez décide encore pour l’adulte que vous êtes
Imaginez un enfant qui, avec ses propres mots et vocabulaires, ses émotions, sa compréhension du monde, son expérience de la réalité, commence à balbutier et à rédiger les premières pages d’une histoire. Dans telle et telle situation, comment dois-je réagir ? Avec telle ou telle personne, comment dois-je me comporter ?, etc. Cette histoire c’est notre scénario, le film que nous nous projetons tout au long de notre vie et qui guide et colore encore aujourd’hui nos choix, nos relations, notre manière d’interpréter ce qui nous arrive et d’interagir avec le monde.
Finalement, c’est avant nos 7 ans que nous traçons, sans en avoir véritablement conscience, les grandes lignes de notre existence. Un fil conducteur tissé d’émotions, de croyances, de décisions prises en réaction à ce que nous avons vu, entendu, ressenti.
Ce que l’Analyse Transactionnelle appelle le scénario de vie, c’est donc ce plan inconscient, élaboré dans l’enfance, constitué de croyances, de décisions et de comportements adoptés en réponse aux messages reçus de notre entourage, qu’ils soient explicites (« Tu es doué », « Tu es intelligent ») ou implicites (« Tu n’y arriveras jamais », « Tu ne réussiras jamais »). Ou des phrases comme « Tu es capable de grandes choses » ou, à l’inverse, des silences pleins de doutes qui peuvent s’imprimer profondément et orienter nos décisions pendant des années.
Ce que nous propose l’Analyse Transactionnelle, c’est de mettre en lumière ce scénario intérieur, souvent silencieux et profondément influent. Elle nous offre la possibilité de le comprendre, de le remercier, de le revisiter et de le réécrire. Car si ce script qui nous a permis de grandir, de nous protéger ou de nous faire aimer dans l’enfance, il n’est plus toujours en phase avec la personne que nous sommes aujourd’hui, ni avec la vie que nous aspirons à construire. D’où la pertinence de l’actualiser.
Comment se forge et s’écrit notre scénario de vie ?
Rappelons-le ! Le scénario de vie est donc une construction mentale que nous élaborons dès l’enfance, pour donner du sens à ce que nous vivons, nous adapter à notre environnement, trouver notre place et protéger notre équilibre émotionnel. Il se tisse et s’étend peu à peu, comme un jardin semé de multiples graines : des paroles, des gestes, des regards, des silences. Certaines de ces graines germent, prennent racine et influencent durablement notre façon d’être. D’autres restent en sommeil ou s’éteignent, sans laisser de trace apparente. Ensemble, elles composent le terreau de notre histoire intérieure, passé, présent et futur. Ci-dessous, un bref aperçu de ces graines, liste non exhaustive
Les messages parentaux (ou injonctions)
Les injonctions sont des messages implicites reçus dans l’enfance qui peuvent limiter ou conditionner nos comportements. Ce sont des messages, souvent répétés, que l’enfant reçoit de ses figures d’autorité : parents, enseignants, proches. Ils peuvent être explicites (« Sois parfait », « Dépêche-toi », « Ne sois pas faible », Ne sois pas toi-même », « Ne réussis pas », « Ne montre pas tes émotions ») ou implicites (des regards, des silences, des attitudes non verbalisées mais très parlantes).
Les permissions et les interdictions
À l’inverse des injonctions, les permissions sont des messages positifs qui encouragent à agir librement et à s’épanouir. Par exemple : « Tu as le droit d’être heureux », « Tu peux réussir ». L’enfant apprend ce qui est autorisé ou interdit, par les mots et par l’attitude de son entourage.
Les décisions de l’enfant
Face aux injonctions reçues, l’enfant prend des décisions inconscientes pour s’adapter à son environnement: « Pour être aimé, je dois être sage », « Je dois toujours faire plaisir aux autres « , « Je n’ai pas le droit à l’erreur ». Ces décisions forment la base du scénario : elles déterminent comment il va percevoir le monde et interagir avec lui tout au long de sa vie. Ces choix sont rationnels à l’âge où ils sont pris, mais deviennent limitants à l’âge adulte si ils ne sont pas revisités.
Le besoin de cohérence
Une fois le scénario en place, l’enfant devenu adulte cherche à confirmer qu’il avait « raison » : il recrée des situations qui valident et revalident son scénario, même si elles sont douloureuses. C’est ce qu’on appelle la reconfirmation du scénario.
Enfant, le scénario de vie nous aide donc à mettre de l’ordre dans l’imprévisible, à donner du sens à un environnement parfois instable, confus ou insécurisant. C’est une manière de construire une stratégie pour se sentir « OK » dans un monde qui semble menaçant ou difficile à comprendre. Ce scénario agit comme une trame psychique structurante, et parfois même salvatrice : il nous protège, nous guide, nous permet d’avancer, de cheminer tant bien que mal dans l’existence. Mais avec le temps, ce qui fut un appui et des repères peut se transformer en une prison ou cage dorée. Les mécanismes qui nous ont aidés à survivre peuvent finir par freiner notre élan de vie, devenir inadaptés, non utiles ou pertinents, voire limitants s’ils ne sont pas remis en question, au goût du jour.
Pouvons-nous réécrire notre scénario ?
Le scénario, ce n’est pas ce que vous vivez, c’est ce que vous continuez à répéter malgré vous, Eric Berne
Il est possible de révisiter et d’actualiser son scénario. Toutefois, le script ne disparaît pas avec la “simple” découverte et compréhension : il se raffine. Il s’adapte. Il devient plus rusé. Il se déguise, il se complexifie. La lucidité ne garantit pas la transformation. Nous pouvons connaître par cœur notre scénario et pourtant : continuer à répondre de manière automatique à certaines figures d’autorité, s’embarquer dans des dynamiques relationnelles qui rejouent des conflits archaïques. comprendre ne signifie pas intégrer.
Le scénario, c’est ce que vous avez décidé enfant, mais c’est à vous, adulte, de choisir si vous voulez encore le jouer
La réécriture du scénario est un processus continu, sans fin. Le concept de réécriture du scénario n’implique pas une table rase, mais un constant dialogue entre le passé et le présent. Il ne s’agit pas de nier ce que l’enfant a vécu, mais d’ouvrir des perspectives nouvelles à l’adulte que nous sommes, par exemple dans une accumulation de micro-choix conscients. Donner des permissions différenciées, oser des expériences correctrices, accueillir l’incertitude, etc. Toujours avec cette idée de sortir du « je dois », pour entrer dans le « je choisis »: cette liberté de choix intérieur.
Comment identifier son scénario de vie ?
En faisant émerger vos croyances profondes, celles qui fondent la personne que vous êtes aujourd’hui. Quelles sont vos croyances, vos “vérités” sur vous-même et sur le monde ? En observant vos schémas répétitifs: qu’est-ce qui se reproduit, inlassablement dans voiture vie? Qu’est ce qui se termine toujours de la même manière ? En interrogeant vos souvenirs d’enfance: quels étaient les messages dominants dans votre famille ? Étiez-vous encouragé ou critiqué ?